Les médias internationaux étaient en ébullition. Non seulement le prince Harry, duc de Sussex, allait-il visiter le camp d’entraînement des Jeux Invictus de Vancouver Whistler 2025, présentés par ATCO et Boeing, mais il allait aussi essayer certains des sports adaptés auxquels les concurrentes et concurrents blessés ou malades participeront aux Jeux de 2025.

Après avoir dévalé une piste gelée sur un skeleton à près de 100 km/h, il a déclaré que « tout le monde devrait l’essayer – ça devrait être obligatoire ».

Et le directeur technique des sports des Jeux Invictus de 2025, Martin Colclough, est tout à fait d’accord.

  1. Colcough a passé 34 ans dans les forces militaires, ayant commencé sa carrière dans le Régiment de parachutistes de l’Armée britannique en 1977, quand il n’avait que 16 ans. Après avoir reçu son insigne en 1979, il a travaillé comme moniteur d’entraînement physique au dépôt du Régiment de parachutistes avant d’être transféré en 1985 au Corps d’entraînement physique de l’Armée britannique. Pendant son mandat de spécialiste de gymnastique à l’Army School of Physical Training [école d’entraînement physique de l’Armée], il a développé un intérêt pour la réadaptation et le sport adapté. Cela l’a poussé à suivre une formation d’orthopédagogue du service conjoint à l’hôpital militaire Queen Elizabeth, à Woolwich, en 1990.

Le cours d’orthopédagogue ayant réveillé une passion enfouie pour les études, M. Colcough est retourné à l’école pour décrocher un baccalauréat spécialisé (avec distinction) en sports et sciences de l’exercice en 1995 et une maîtrise en réhabilitation et en recherche trois ans plus tard.

  1. Colcough est lié au sport adapté depuis plus de 30 ans. Il a travaillé comme entraîneur de cyclisme et comme gestionnaire principal de la performance paralympique pour UK Athletics. Il était membre du personnel de base de Paralympics GB pour les Jeux de 2008 à Beijing et de l’équipe de base pour les Jeux paralympiques de Londres 2012.

Les Jeux Invictus de 2025 laisseront notamment en héritage l’Initiative de recherche de l’ICRSMV de Les Fleurons glorieux, qui explore le rôle des sports adaptés – comme le volleyball assis, le ski sur luge et le basketball en fauteuil roulant – dans le parcours de réhabilitation et de rétablissement. Puisque la carrière de M. Colcough est centrée sur le développement des programmes de rétablissement par le sport pour les anciennes combattanttes et anciens combattants blessées ou malades, les Jeux sont un endroit parfait pour lui et Les Fleurons glorieux s’est entretenu avec lui au sujet du pouvoir de guérison du sport – et aussi de ses risques.

L’un des objectifs de recherche des Jeux Invictus de 2025 est de « passer en revue les avantages potentiels associés à la participation aux sports extérieurs pour lesquels le niveau de risque perçu est élevé, mais dont le risque réel reste faible ». Comment cela se fait-il?

Voici un exemple : la plupart des gens croient que des activités comme le skeleton, que nous offrirons aux Jeux de 2025, présentent un très haut risque : vous êtes sur la glace, vous descendez tête première et vous ne pouvez pas voir où vous allez. C’est une activité qui provoque la réaction de lutte, de fuite ou de blocage.

Mais, dans ce cas, nous réduisons le niveau réel de risque en assurant la présence d’entraîneures et d’entraîneurs qualifiés, en plus d’offrir des séances d’information pour que les personnes participantes sachent ce qu’elles et de l’équipement de sécurité. Ainsi, vous exposez les gens à des activités qui font augmenter leur anxiété, mais avec un risque de blessure presque nul.

Les personnes qui vivent avec une maladie, un handicap ou une blessure vivent aussi souvent avec de l’anxiété. En leur faisant découvrir le sport adapté, on leur permet d’acquérir un ensemble de compétences leur permettant de gérer leur anxiété quand elles font ces activités plus aventureuses. Cela devient un pont pour apprendre comment gérer leur anxiété de tous les jours.

Participer au sport adapté leur permet d’amorcer une conversation au sujet de la façon dont elles se sentaient pendant leur expérience et des stratégies utilisées pour gérer leur anxiété. Leur expérience peut servir de plateforme pour l’établissement de futurs objectifs.

Pourquoi est-ce important?

La prise positive de risques et l’établissement d’objectifs aident les gens à développer leur autonomie, ce qui est important quand on est blessé ou malade. Au début de la phase médicale de leur réadaptation, plusieurs personnes blessées ou malades doivent subir des procédures et d’autres activités qui leur sont imposées – et, à ce moment, cela est absolument essentiel parce qu’elles pourraient devoir subir des interventions destinées à préserver leurs membres et à sauver leur vie.

Après que le processus de réhabilitation et de réadaptation est lancé, le rôle de la clinicienne ou du clinicien est de vous aider à prendre des décisions éclairées sans préjugé. Mais ce ne sont pas toutes les cliniciennes et tous les cliniciens qui le font, et parfois, ils n’encouragent pas les gens à prendre des décisions qui leur conviennent en raison de leur propre peur du risque.

Les cliniciennes et cliniciens peuvent avoir une perception élevée du risque que posent les activités comme le sport adapté, même s’il y a des mesures de contrôle en place, comme de l’équipement et des entraîneures et entraîneurs spécialisés. Les personnes ne sont pas exposées à un niveau de risque au-delà de leurs capacités, mais les cliniciennes et les cliniciens pourraient ne pas soutenir leurs clientes et clients qui veulent essayer un sport adapté si la seule expérience qu’ils ont eue du ski, par exemple, est le ski traditionnel plutôt qu’une version adaptée comme le ski sur luge.

Selon mon expérience, les cliniciennes et les cliniciens raisonnables réalisent que développer l’autonomie de leurs clients présente plus d’avantages. Le scénario le plus pessimiste se réalise rarement et, la plupart du temps, les personnes se connaissent mieux que leur clinicienne ou clinicien.

Un des inconvénients potentiels de la participation aux sports est leur coût élevé. Comment les gens peuvent-ils surmonter cet obstacle?

Il y a beaucoup de façons peu coûteuses de pratiquer des sports, comme la natation ou le volleyball. On peut évaluer ce à quoi les personnes ont accès et les aider à concevoir des programmes qui sont dans les limites de leurs moyens.

Au niveau local, certains programmes pour les militaires actifs et à la retraite ont approché les clubs de sports adaptés pour personnes civiles afin d’utiliser leurs ressources et leur équipement. Partager des ressources de cette façon permet de faire des économies et de renforcer la communauté; les membres militaires font grossir les rangs d’un club et le rendent plus viable tout en occupant souvent des rôles de chauffeures, de chauffeurs ou autres bénévoles.

Les Jeux Invictus de 2025 laisseront aussi en héritage de l’équipement pour les programmes sportifs locaux à l’intention des personnes ayant un handicap, comme des carabines laser spécialisées pour les personnes ayant une déficience visuelle; ces carabines n’utilisent pas de munitions réelles et émettent un signal sonore quand on est sur la cible. Donner l’équipement des Jeux est une façon de remercier la communauté et représente aussi un avantage pour elle.

Décrivez le volet de recherche des Jeux 2025. Qu’espérez-vous apprendre?

L’Initiative de recherche de l’ICRSMV de Les Fleurons glorieux fait partie de l’héritage des Jeux, qui sera bien plus qu’un événement sportif. Nous voulons que notre travail serve à guider nos futures pratiques en ce qui a trait au développement de programmes de rétablissement par le sport.

Nous évaluons l’impact du rétablissement dans la pratique de sports extérieurs ou intérieurs. Si le ski sur luge est mieux que le volleyball assis, on devrait en faire davantage, mais il faut également comprendre pourquoi l’un est mieux que l’autre. Les Jeux nous donnent la chance de mettre à l’épreuve ces idées.

Nous étudierons également les expériences que vivent les familles des concurrentes et des concurrents ainsi que les celles des concurrentes et des concurrents. Est-ce qu’inclure la famille des concurrentes et des concurrents aux Jeux sera plus profitable pour elles et eux? Après les Jeux, pendant combien de temps les répercussions positives des Jeux se font-elles sentir, et à quoi les personnes participantes attribuent-elles cela?

Nous utilisons le contexte d’une édition de Jeux d’hiver hybrides pour trouver des activités qui accélèrent l’atteinte de résultats dans le processus de réhabilitation et de réadaptation. C’est pourquoi il est crucial que nous puissions transférer les connaissances acquises avant et pendant les Jeux pour améliorer l’efficacité des programmes de sport adapté et leur accessibilité à longueur d’année dans les communautés où les anciennes combattanttes et les anciens combattants vivent et travaillent.

Les Jeux durent une semaine et de nombreuses personnes ne sont pas en mesure d’y participer, mais nous voulons qu’elles puissent en profiter elles aussi.

Les Jeux de 2025 ne seront pas votre première expérience Invictus – quels sont vos antécédents aux Jeux?

Mes antécédents aux Jeux Invictus remontent à 2013. J’étais chef d’équipe pour Équipe Royaume-Uni aux Warrior Games quand nous avons accueilli le duc de Sussex qui, à la cérémonie d’ouverture, a annoncé que les premiers Jeux véritablement internationaux auraient lieu à Londres l’année suivante.

En plus d’être le chef d’équipe pour Équipe Royaume-Uni aux Jeux Invictus de Londres 2014, j’ai aidé, avec un de mes collègues, le comité d’organisation à choisir les sports, faire une ébauche de l’horaire et rédiger le premier ensemble de règles et le système de classification , qui restent en grande partie inchangés.

En 2015, j’ai invité le chef de la direction de la Fondation des Jeux Invictus à assister au Camp de sport d’hiver des Alliés, organisé par le programme Sans limites et appuyé par Les Fleurons glorieux. C’est là que Chelsey Walker, qui était alors cheffe de la direction de Whistler Adaptive, a tout d’abord proposé l’idée d’une édition hivernale des Jeux.

À Orlando, en 2016, j’ai participé à mes derniers Jeux comme chef d’équipe, mais surtout, je co-supervisais un étudiant de doctorat qui enquêtait sur l’impact qu’ont les « facteurs de stress sur le plan organisationnel » sur l’expérience des concurrentes et des concurrents aux Jeux en mesurant le niveau de cortisol, une hormone du stress, dans leurs échantillons de salive. Ce travail a eu une incidence directe sur la façon dont Équipe Royaume-Uni s’est préparée en vue des éditions futures des Jeux en mettant en place des interventions visant à réduire le niveau de stress vécu par les concurrentes et les concurrents.

Aux Jeux de Toronto 2017 et de Sydney 2018, un membre de mon équipe est devenu chef d’équipe et j’ai accepté le rôle de chef de mission pour Équipe Royaume-Uni.

Tout juste avant le début de la pandémie, j’ai été licencié de l’organisme de bienfaisance britannique « Help for Heroes ». J’ai croisé Nick Booth à l’occasion d’une conférence à Londres et il m’a dit que Les Fleurons glorieux espéraient présenter une soumission pour accueillir les Jeux d’hiver et m’a demandé si je voudrais aider. J’ai évidemment dit oui. En plus de rédiger la section sur les sports du cahier de candidature, j’ai aussi accepté de participer à l’élaboration de deux volets pour l’héritage et d’une proposition de recherche propre aux Jeux et d’autre matériel pédagogique pour les nations participantes, pour qu’elles puissent mieux se préparer pour leur participation aux nouveaux sports d’hiver.

Nous avons remporté les Jeux et mon rôle est maintenant de fournir du soutien spécialisé à Les Fleurons glorieux en ce qui a trait à l’héritage et au travail de recherche ainsi qu’au comité d’organisation local sur la tenue des Jeux. Cette rencontre fortuite avec Nick m’a poussé à assister aux Jeux à La Haye et à Dusseldorf, donc je m’estime très chanceux d’avoir participé à toutes les éditions des Jeux, dans des rôles de plus en plus emballants et changeants depuis 2014.