Le Canada de souvient : le jour J et la bataille de Normandie

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, le Canada s’est engagé dans de nombreux combats difficiles pour aider les forces alliées à remporter la victoire. Le jour J et la bataille de Normandie constituent l’un des chapitres les plus connus de l’ensemble du conflit et les membres de nos Forces armées ont joué un rôle important dans cette mission cruciale.

Printemps 1940 : au cours des premiers mois de la Seconde Guerre mondiale, l’Allemagne envahit une grande partie de l’Europe occidentale. La Manche, un large bras de mer, sépare à elle seule la Grande-Bretagne des forces ennemies qui surgissent, mais la nation insulaire défend sa position. Les années suivantes, les pays conquis sur le continent souffrent énormément de l’occupation impitoyable.

Les forces alliées prennent lentement le dessus sur la puissante machine de guerre ennemie en Afrique du Nord, en Italie, sur le front de l’Est, dans le ciel européen et sur l’océan Atlantique. La victoire dépend toutefois de la défaite de l’Allemagne en Europe occidentale et c’est en 1944 que les puissances alliées lancent enfin une contre-attaque solide.

Les forces alliées ciblent les plages de Normandie, en France, pour le débarquement. On prend plus d’un an pour planifier et préparer cette mission ambitieuse, que l’on appelle opération Overlord.

L’établissement d’une tête de plage sur le territoire occupé de la France représente un défi de taille pour les forces alliées. Le long de la côte européenne, l’Allemagne occupe une impressionnante série de positions défensives, soit de la frontière espagnole à la Scandinavie. Surnommée « Forteresse Europe » par Adolf Hitler, ses rives sont jonchées de mines terrestres, de fil barbelé, de repaire fortifié en béton, de batteries d’artillerie, de nids de mitrailleuses, de murs antichars et de milliers de membres des troupes ennemies qui surveillent avec vigilance.

Le haut commandement des forces alliées décide d’attaquer le 6 juin 1944, date historique que l’on connaît comme « jour J ». Une puissance alliée massive traverse la Manche en direction d’une étendue de 80 km sur la côte normande. On assigne cinq zones de débarquement aux Forces armées de différentes nations : Juno Beach (Canada), Gold Beach (Royaume-Uni), Sword Beach (Royaume-Uni et France) ainsi que les plages Utah Beach et Omaha Beach (États-Unis).

Les troupes canadiennes réussissent à s’emparer de leurs positions riveraines à Juno Beach et sont celles qui, parmi près de 155 000 membres des troupes alliées débarquées le 6 juin 1944, avancent le plus loin dans les terres. Cependant, le jour J n’est que le début de la lutte en vue de la libération de la France.

La bataille de Normandie marque le début d’un combat acharné de onze mois dans le Nord-Ouest de l’Europe. Le Canada joue également un rôle important dans les rudes batailles menées dans des endroits comme l’Escaut, la Rhénanie et les Pays-Bas au cours des offensives alliées qui contribuent à la défaite de l’Allemagne et à la déclaration du jour de la Victoire en Europe (V-E), le 8 mai 1945.

Le 6 juin à 11 heures, heure d’été de l’Europe centrale (HEC), vous pourrez suivre la cérémonie commémorative en direct de la France sur la page Facebook « Le Canada se souvient » d’Anciens Combattants Canada ou sur la chaîne CBC.

Les Fleurons glorieux a rencontré Mark Zuehlke, auteur de Juno Beach (en anglais) et grand auteur canadien en matière d’histoire militaire populaire, et s’est entretenu avec lui sur le parcours qui a précédé ce jour décisif ainsi que sur son expérience pour découvrir ces témoignages de courage et de sacrifices faits au profit des générations futures.

Quelle est la situation de l’armée allemande en 1944, avant le jour J?

La guerre éclair est terminée. L’armée allemande tente de maintenir la situation en Russie jusqu’à Stalingrad, mais Stalingrad est en fait le tournant décisif de la guerre pour l’Allemagne. Elle perd toute son armée et ne peut pas la remplacer ou la récupérer. Elle perd ses troupes : ce sont des milliers et des milliers de personnes et tout l’équipement dont il ne reste rien. Dès lors, elle est sur la défensive. Elle perd du terrain, recule en Italie et doit toujours maintenir des divisions dans ce pays. Elle a tellement d’effectifs immobilisés en Russie et en Italie qu’elle n’a pas la capacité de faire face à l’ouverture du front de Normandie.

Il y a aussi un moment critique au cours duquel l’Allemagne croit que le débarquement en Normandie n’est qu’un subterfuge. Les adeptes d’Hitler pensent fermement que l’invasion aura lieu au Pas-de-Calais. Mais les données des services de renseignements sont erronées : les troupes n’ont que quelques heures pour se préparer et elles n’y parviennent pas. Elles ne peuvent pas réagir assez vite parce que les divisions Panzer ne sont pas bien réparties et n’ont pas le temps de se déplacer.

Elles essaient malgré tout et, au cours des six premiers jours, elles y arrivent presque. Cette attaque vise la division canadienne, qui a un rôle clé à jouer : si l’Allemagne parvient à vaincre le Canada, le Royaume-Uni sera divisé en deux flancs et facile à conquérir. Si l’Allemagne peut se débarrasser des troupes britanniques et canadiennes, elle peut ensuite s’occuper tranquillement des troupes américaines. Mais le Canada remporte cette contre-attaque. Ce n’est vraiment que le 12 juin que l’on comprend que l’invasion est en cours sur la terre ferme et que la seule solution est désormais d’aller de l’avant.

À l’époque, quel rôle joue l’entraînement pour la division canadienne, dont beaucoup de membres sont novices sur le champ de bataille?

Il s’agit de la première armée canadienne mise sur pied et on l’établit en Angleterre, où l’on compte plus de 100 000 membres des Forces armées canadiennes. À l’exception des troupes qui se trouvent à Dieppe, elles ne combattent pas pour le moment. Le Canada est appelé à jouer un rôle majeur au cours de l’invasion, quel qu’en soit le moment ou le lieu. La 3e division et la 2e brigade blindée canadienne forment la pointe de la flèche. À partir de 1942, ces deux divisions travaillent sans cesse : elles s’entraînent à mener des opérations amphibies et se préparent au débarquement. Elles effectuent un certain nombre d’exercices au cours desquels elles partent en mer et débarquent ensuite sur des plages britanniques. Les Forces britanniques en font autant, et les connaissances qui en découlent sont à l’origine d’innovations comme le .

À mon avis, la 3e division d’infanterie canadienne constitue sans doute la force de débarquement amphibie la plus sophistiquée des forces alliées dans le théâtre nord-ouest au moment de l’invasion. L’entraînement permet aux troupes canadiennes de savoir comment débarquer, puis elles ont bien planifié quoi faire après le débarquement et dans l’ensemble, tout se passe comme prévu.

On minimise le fait que le Canada se rend le plus loin dans les terres, plus loin que les troupes britanniques ou américaines, mais c’est important, d’autant plus que Juno est une plage fortement protégée. Le Canada compte le deuxième plus grand nombre de victimes, et malgré tout, il manque de peu son objectif pour le jour J : se rendre à l’aéroport de Carpiquet. De plus, n’oublions pas la présence des troupes allemandes ou encore le fait que l’intensité des combats ne diminue pas après le départ de la plage, loin de là. Les troupes canadiennes parcourent six milles à l’intérieur des terres, ce qui est un exploit incroyable.

Dans votre livre Juno Beach, vous décrivez clairement les contraintes physiques des membres des forces : le poids de leur sac à dos, le mal de mer, le traitement des blessures. Comment avez-vous découvert des détails aussi précis et les avez-vous retranscrits de façon aussi pertinente?

J’ai eu beaucoup de chance avec Juno Beach. Les anciens combattants avaient encore une mémoire assez nette quand j’écrivais ce livre. Mais le vieillissement des anciens combattants et leur perte de mémoire ont imposé des limites pour la rédaction de mes derniers livres. Je suis également romancier et journaliste de formation. J’ai donc pu mettre mes compétences au service du projet.

Pour Juno Beach, j’ai interrogé environ 200 anciens combattants et un collègue de l’Ontario a interrogé des anciens combattants pour moi parce qu’il connaissait des gens au sein de certains régiments. Par ailleurs, l’Université de Victoria a mis en place il y a longtemps un programme d’histoire orale militaire. Ce programme était géré par Reg Roy, un ancien combattant de la Seconde Guerre mondiale qui demandait tous les ans à des étudiantes et étudiants diplômés de s’entretenir avec des anciens combattants. Beaucoup de membres des Forces armées ont pris leur retraite à Victoria, et pas seulement les membres du Canada qui provenaient de l’Ouest, de sorte que l’on y trouve une multitude de témoignages personnels.

Quelle raison vous a poussé à écrire au sujet de l’histoire militaire canadienne?

Dans ma jeunesse, je lisais principalement des récits américains et britanniques, parce que c’est tout ce qui existait à la fin des années 1960 et au début des années 1970. On trouvait très peu d’histoire militaire canadienne, à l’exception les documents officiels. Nous avons appris à considérer la participation canadienne selon une perspective américaine ou britannique et si on la mentionnait, c’était généralement de manière désobligeante.

Dans les années 1990, j’ai rencontré des personnes qui avaient servi pour le Canada à la bataille d’Ortona et dont les récits étaient incroyables, mais inédits. À cette époque, j’avais déjà publié quelques livres et j’ai donc élaboré une proposition de livre à propos de cette bataille, que mon agent a fait circuler pendant deux ans. Les réponses habituelles des maisons d’édition ressemblaient à : « C’est sur la Seconde Guerre mondiale. Ça fait longtemps et n’intéresse plus personne ».

Puis à peine cinq jours après la sortie du film « Saving Private Ryan » (Il faut sauver le soldat Ryan), une maison d’édition a appelé mon agent et lui a demandé si l’on voulait toujours publier le livre à propos d’Ortona (en anglais). C’est ce qui a donné le coup d’envoi au processus qui m’a amené à écrire d’autres livres et à rédiger la série sur les champs de bataille canadiens (en anglais).

Participez à la commémoration

Il y a plusieurs événements et façons de marquer le 80e anniversaire du jour J :

« Le Canada se souvient : Le jour J et la bataille de Normandie « a été publié par Anciens Combattants Canada à titre de supplément éducatif et a été modifié en vue de son utilisation dans le présent article.